« C’est la p’tite bête qui monte, qui monte, qui monte, quiiiii mooonnte et… qui descend ! »
Par cette comptine qui illustre bien l’entrée du jeu dans nos vies et ce dès le berceau, et surtout la joie partagée qui l’accompagne, tentons de saisir à quel point le Jeu peut, à tout instant, être présent dans nos vies ; et surtout, ce qu’il nous apporte.
De par nos enfants, ou au travers de nos amitiés et des différentes relations qui jalonneront nos vies – par des jeux de séduction, de pouvoir,… – ou même seul.e, nous le rechercherons, cet état d’esprit transmis par le Jeu, et ce à tout âge. Il nous enrichit, nous apporte la joie de vivre, le relâchement dont nous avons besoin pour poursuivre notre chemin. Et même, s’il nous est dit qu’adultes, il est inutile voir inconvenant, nous savons instinctivement que le Jeu nous nourrit, seul ou au travers de nos relations. Rappelez-vous votre dernière partie de jeu… ressentez-vous cette émotion qui vous emplit et qui amène le sourire à vos lèvres rien qu’à son évocation ?
En tant que sexologue, je constate bien souvent un mal à être dans les relations conjugales, un appauvrissement du lien ou du moins une ombre planant sur ce dernier. Et souvent, dans le même temps pour les « couples-parents », la relation à l’enfant est nourrie. Elle apporte satisfaction – avec des moments de doute, aussi, bien sûr… – mais, dans l’essentiel, elle communique un état de bonheur et d’allégresse.
Amoureuse du jeu et de ses bienfaits, au travers des observations de ma clinique sexologique et d’éducatrice, je me suis demandé :
Comment le Jeu pourrait-il donner, au sein du couple, tout comme en famille, des clés de compréhension et de rapprochement ?
Est-ce que le Jeu pourrait servir à restaurer l’Éros d’un côté, et la parentalité de l’autre ?
Si vous me le permettez, dans un premier temps, j’aimerai revenir à l’étymologie qui permet de se mettre d’accord sur ce dont il est question – merci d’ailleurs à ce professeur qui m’a initié à cette étude, lors de ma formation d’éducatrice de jeunes enfants, c’est un outil formidable.
Si l’on recherche l’origine du terme « conjugalité », on lui trouve une racine latine « conjugalis », venant du verbe « conjugare » signifiant « unir ».
Il s’agit donc bien de lien. La conjugalité est un lien à préserver et à entretenir.
Le jeu pourrait donc très bien venir remplir, ici, une de ses fonctions premières.
Du coup, dans un second temps, j’aimerai vous exposer cette réflexion, qui est la mienne, et qui à partir d’un présupposé relativement acceptable, serait que la parentalité viendrait mettre en relief nos manques de communication et de confiance conjugales déjà existantes, ainsi que nos félûres individuelles. Et que c’est au travers de notre rôle de parents, et donc dans cette nouvelle équipe générant de nouvelles règles, que viendraient se rejouer des conflits du passé, des divergences d’opinions plus ou moins fortes, plus ou moins installées, des dissensions latentes.
Donc, en partant de ce postulat, le jeu au sein du « couple-parents » pourrait-il nous permettre de ressouder le lien préexistant ? Serait-ce là, l’opportunité de renforcer la conjugalité, de sublimer nos manques, par une prise de conscience et une volonté à grandir ensemble ?
Si l’on prend comme outil, le Jeu, celui-ci pourrait-il du coup servir d’entremetteur, de médiateur, dans une situation de couple quelque peu tendue ?
Et, au final, qu’aurait-on à perdre de tenter l’aventure du jeu comme renforcement du lien ?
Le jeu pourrait également permettre d’accepter de différer le côté coïtal de l’acte : le sexe pour le sexe !
Oui on souhaite et on aimerait trouver le temps, l’énergie, le désir de faire l’amour, mais nos vies de parents sur-investies et/ou surchargées s’imposent et volent parfois les fragiles occasions de « s’envoyer en l’air ».
Grâce à l’introduction du Jeu dans la relation érotique, on gagnerait par une mise en perspective, un horizon d’attentes à atteindre… plus tard… lors de la sieste des enfants… entre deux allers/retours pour les activités… ou ce soir, avant qu’harassé.e.s, on ne sombre dans les bras de… Morphée ! Toute la tension sexuelle serait titillée sous forme de jeux continus qui nous tiendraient en haleine, au cours de nos prérogatives parentales, comme un fil tendu entre soi et l’autre, entre son désir et le nôtre ! Le jeu maintiendrait alerte notre éveil érotique dans ce lien qui n’est pas uniquement celui d’une équipe gérant des mini-soi.
Il a clairement été établi que le jeu était une médiation relationnelle. Sa fonction de reliance se fait au travers de sentiments forts, telles que la joie, la complicité.
Par son biais, l’idée de travailler autour d’une communication non-violente, et ce jusque dans les rapports érotiques, est alors, à mon sens, pleinement envisageable, en tant qu’effet Kiss-Cool. Le Jeu servirait ainsi à se parler, à oser dire : le jeu serait comme une invitation à exprimer ses difficultés ou ses fantasmes.
Le Jeu offre l’occasion de faire la paix !… avec soi-même et avec l’autre. Il suffit de constater ce que nous mettons naturellement en place lors de conflits, de crises de colère avec nos enfants : le jeu pour détourner la trop grande émotion sur laquelle on ne peut poser de mots et qui pour le moment serait bien trop à fleur de peau pour être expliquée… Le jeu pour se retrouver et faire fi des colères et déceptions qui nous éloignent les un.e.s des autres. Le Jeu n’a pas tout pouvoir mais sa puissance est grande !
« Petits enfants, petits problèmes. Grands enfants, grands problèmes. » Est-ce vrai ?!
Ce sont les mêmes problématiques que nous rencontrons, nous, grands enfants, mais à une échelle plus large, sous différents angles, et avec certaines responsabilités non-négligeables. Mais tout de même, se laisse t on le droit de jouer, comme on se laisse le droit de jouir??!
Et, si, finalement, en tant que sexologue, j’entends vouloir proposer le Jeu comme une introduction à des préconisations sexologiques certes, mais également conjugales et parentales. Est-ce si déconnant ?!!
D’ici là, jouez autant que faire ce peut. Amusez-vous ! Détendez-vous ! La vie est déjà si complexe…
Sexologiquement vôtre 💗
Isabelle Doussaud-Pronzola